Le 15 avril 1806, les rangs de la Garde Impériale s’ouvrirent devant de fiers
soldats qui venaient prendre place au foyer de gloire où brillait le génie de
Napoléon.
La gloire, ces hommes la connaissaient déjà : ils avaient plus
d’une fois, montré leurs fronts sereins à la mort menaçante ; ils avaient vu
plus d’une fois poindre l’aurore de la victoire à travers la brume des combats,
car les plus jeunes d’entre eux comptaient au moins douze années de service, et
l’histoire nous apprend ce qu’étaient ces années, ce qu’étaient ces
services.
Ils apportaient à la Garde, ce cœur vibrant et généreux de la
Grande Armée, un peu de l’âme vaillante et fidèle des divers régiments de
dragons dont ils avaient été l’élite, et qu’ils allaient, de par la volonté du
Maître, représenter dans une élite.
Ces braves comprirent que l’Empereur
récompensait en eux le dévouement et le courage de tous, qu’il honorait en eux
les cadets et les aînés, ceux qui frémissaient d’impatience au seuil de l’avenir
et ceux qui dormaient du sommeil des héros sous le gazon fleuri des champs de
bataille ; et lorsqu’ils répondirent : « Présent ! » à l’appel des officiers de
grenadiers et de chasseurs de la Garde qu’on leur donnait pour capitaines et
pour lieutenants, une émotion pieuse, faite de reconnaissance et de joie,
souleva leurs robustes poitrines.
Dès lors, il leur sembla qu’ils n’avaient
plus rien à envier, et ils n’enviaient plus rien.
Un frisson pourtant les
secoua encore lorsqu’ils virent apparaître à la tête de leur nouveau régiment,
composé de trois escadrons dont un de vélites, un membre de la famille
impériale, l’intrépide Arrighi ; et leur émotion reconnaissante s’augmenta,
cette fois, d’une légitime fierté.
Alors, ces anciens déjà glorieux
redevinrent des conscrits pleins d’ardeur, manoeuvrèrent comme de jeunes
soldats, pour acquérir la cohésion nécessaire, pour fondre en une seule âme les
âmes diverses des dragons de France.
Lorsque Arrighi eut fait de son régiment
un bloc superbe, il pria l’Empereur de réaliser le rêve des dragons de la Garde
en laissant tomber sur eux le regard qu’ils espéraient, ce regard que buvaient
les braves comme la fleur boit la rosée des matins et qui faisait germer dans
les cœurs la divine fleur de l’héroïsme.
L’Empereur se montra.
On vit
courir un frisson sur les sabres qui hérissaient le bloc, on vit passer une
flamme dans les yeux des soldats ; et dans ces yeux agrandis par l’enthousiasme
et l’admiration, le Maître put lire comme en un livre.
Il fut satisfait sans
doute, car il voulut présenter lui-même le régiment à l’impératrice Joséphine.
L’aimable souveraine admira les fiers soldats, versa le charme d’un sourire sur
l’enthousiasme qui gonflait les cœurs, et s’offrit pour servir de marraine au
régiment.
Les dragons de la Garde, devenus « Dragons de l’Impératrice »
purent croire au bonheur et envisager l’avenir avec confiance, puisqu’ils
rencontraient, au début de leur carrière, le sourire d’une femme et l’amitié
d’une reine.
A l’heure même où, en France, une souveraine baptisait les
dragons de la Garde et souriait à leur printemps, une autre souveraine, dans les
plaines de la Saxe où l’armée prussienne attendait les soldats de Napoléon,
enflammait de ses sourires le régiment de dragons qui portait son nom et dont
elle avait revêtu l’uniforme.
Les dragons de l’impératrice Joséphine
voulurent reconnaître par une victoire l’amitié de la douce fée qui avait mis la
caresse d’un sceptre sur le berceau du régiment.
Ils prirent congé de leur
gracieuse protectrice à Mayence, où elle avait accompagné l’Empereur, en lui
promettant de cueillir pour elle les immortels lauriers que la belliqueuse
épouse de Frédéric-Guillaume rêvait d’ajouter au panache de son casque ; puis
ils partirent, emportant son image en leurs cœurs.
Ils passaient comme une
trombe, dans la poussière des routes ; mais la victoire avait des ailes : elle
les devança, le 14 octobre, dans les champs fertiles d’Iéna.
L’Empereur
conduisit alors ses dragons à Berlin, à Posen, à Varsovie.
Les soldats de
l’Impératrice, maudissant le destin contraire qui ne leur avait pas permis de
moissonner la gloire dans les sillons d’Iéna, promenèrent leur rêve héroïque à
travers les mosaïques fleuries où frissonnent l’Oder aux reflets d’acier et la
mélancolique Wartha, foulèrent le gazon lépreux des déserts mornes de la
Pologne, et allumèrent une flamme d’espérance dans le cœur des fils de
Sobieski.
Le destin, qui les avait réservés pour d’autres combats, pour
d’autres moissons, leur permit enfin de vivre leur rêve.
Les soldats du tsar,
battus successivement à Czarnowo, à Lopakzin, à Golymin et à Pultusk,
rétrogradaient vers Kœnigsberg, poussés vigoureusement par les troupes
françaises, meute formidable qu’animait la voix de Napoléon.
A Eylau, les
Russes durent faire face à la meute ; ils durent employer de nouveau la fortune
qui leur avait quatre fois déjà refusé ses faveurs. Les dragons de la Garde
comprirent que le moment était venu pour eux de payer le sourire de la femme et
l’amitié de la souveraine.
Ils furent sublimes.
A plusieurs reprises,
l’Empereur vit entrer comme un boulet dans les masses ennemies le superbe
régiment d’Arrighi ; il le vit bondir au milieu de cette mer humaine comme un
torrent furieux dont un obstacle arrête un instant la course folle, puis sortir
par une brèche sanglante que bouchaient aussitôt de nouvelles poitrines.
Les
dragons de la Garde cueillirent, dans la neige d’Eylau, les lauriers qu’ils
n’avaient pu moissonner dans les champs d’Iéna.
La récolte, hélas leur coûta
bien des deuils, et la gracieuse souveraine laissa tomber une larme sur le
bulletin de victoire qui célébrait l’héroïsme de ses filleuls.
Pendant cette
campagne de 1807, le régiment eut l’occasion de se distinguer encore dans tous
les engagements qui préludèrent à la journée de Friedland.
Combattant tantôt
à pied, tantôt à cheval, selon la tactique et les traditions de l’arme, les
dragons étaient des adversaires redoutables.
Au moment de l’action, ils
mettaient pied à terre, laissaient leurs chevaux à distance et profitaient des
accidents du terrain pour attaquer en tirailleurs.
Soudain l’ennemi stupéfait
voyait les tirailleurs se rallier sous le feu, sauter en selle et charger en
colonne serrée. On eût dit un cyclone naissant brusquement dans un léger orage
de printemps.
L’effet produit était merveilleux ; et plus d’une fois,
l’audacieuse tactique des dragons fit pencher vers nos armes la balance de la
fortune.
L’Empereur avait conservé la vision des charges magnifiques d’Eylau
; le 1° décembre 1807, il augmenta de deux escadrons son régiment de dragons,
dont l’effectif fut alors exactement de douze cent soixante-neuf hommes. Au
commencement de l’année 1808, une partie du régiment se mit en marche, à travers
les brumes de l’hiver français, pour aller guerroyer sous l’éternel azur de
l’Espagne, dans la douceur d’un éternel été.
Les fiers soldats de
l’impératrice contribuèrent à étouffer la révolte de Madrid ; puis ils
poussèrent leurs chevaux vers l’Arlanzon et l’Ebre, ces joyaux sertis par la
nature dans un écrin de verdure et de fleurs, et s’arrêtèrent devant
l’Atlantique, après avoir forcé Burgos, Logroño, Palencia, Valladolid et
Santander. Ils couronnèrent cette merveilleuse chevauchée en accablant l’armée
de Galicie à Médina-del-Rio-Seco et en refoulant vigoureusement l’ennemi sur
Bonavente, Mayorga et Léon.
L’Empereur vint alors les rejoindre avec le reste
du régiment.
Sous les ordres du Maître, les dragons de la Garde se montrèrent
supérieurs à leur jeune et glorieuse réputation.
Dans une nouvelle
chevauchée, qui fut comme le second acte d’une féerie, ils chassèrent de la
Vieille-Castille l’armée d’Estramadure, abreuvèrent leurs chevaux dans les
marbres de l’Escurial, passèrent sur le ventre des Espagnols à Somo-Sierra, et
rentrèrent en vainqueurs à Madrid.
Ils acculèrent ensuite l’ennemi à la
Corogne, devant cet Atlantique tour à tour gracieux et sauvage, qui mêle sa
large rumeur à la chanson de la brise et son âpre senteur aux parfums de
l’Espagne.
Ce fut le dernier acte d’une féerie qui ne devait pas avoir
d’apothéose.
Les dragons abandonnèrent le décor ensoleillé où ils venaient de
vivre une épopée pour marcher vers les plaines du Danube, où le canon de
l’Archiduc Charles ouvrait la rude campagne de 1809.
Abensberg, Eckmühl,
Landshut, Ratisbonne et Vienne furent pour eux de simples étapes sur la route
qui devait les conduire à la gloire d’Essling et de Wagram.
Devant le grand
fleuve tranquille dont l’eau verte reflétait un ciel monotone et doux, dans une
atmosphère mélancolique où semblait flotter le souvenir des héros dont les
légendes du pays germain célèbrent les fabuleux exploits, les dragons de
l’Impératrice, ces héros de la vieille Garde, ajoutèrent deux pages qui valent
les plus belles légendes.
Après Wagram, ils purent enfin remettre le sabre au
fourreau et tourner vers la France la tête de leurs chevaux.
Et la France les
trouva beaux comme la légende et grands comme l’histoire, ces soldats qui
venaient goûter, sous le ciel natal, un repos gagné par tant de victoires. Les
dragons pourtant ne se reposèrent pas tous ; deux de leurs escadrons franchirent
les Pyrénées, apportant à l’armée d’Espagne un peu de la gloire du Danube.
Au
mois de mars 1812, les dragons de la garde sautèrent en selle, et sous les
ordres du général Saint-Sulpice, leur colonel, s’acheminèrent joyeusement vers
les grasses prairies de l’Allemagne, qui devaient être pour eux comme le
vestibule fleuri des immensités blanches de la Russie.
Quelques mois plus
tard, ils campaient sur les ruines fumantes de Smolensk après avoir promené
l’ombre de leurs escadrons dans l’eau transparente du Niémen, traversé Wilna au
milieu des acclamations des Lithuaniens, et reçu dans leurs bras, à Witepsk, les
frères que leur rendait l’Espagne.
La nature, qui devait les trahir, la
fortune, qui devait les abandonner, souriaient alors à leur enthousiasme et à
leur foi.
Ils crurent au sourire de la nature et au sourire de la fortune ;
ils crurent à la gloire, qui chantait en eux sa jolie chanson et mettait en
leurs âmes le rayon d’or de l’espérance.
Bientôt, hélas ! la fumée de Moscou
étouffa la chanson, emporta l’enthousiasme et l’espérance. Mais rien ne put
entamer la foi des dragons de la Garde.
Ils furent admirables dans le drame
de la Russie comme ils l’avaient été dans la féerie de l’Espagne.
Le froid,
la faim, la maladie, la misère, se heurtèrent sans succès au granit de leurs
consciences. Ils laissèrent sous la neige bien des cadavres ; ils n’y laissèrent
pas une parcelle de leur réputation.
Partout où le danger se présenta, on les
vit enlever leurs chevaux grelottants ; et comme toujours les cosaques russes
reculèrent devant ces hommes, qui étaient des fantômes, et ces chevaux , qui
étaient des squelettes.
A Bourzowo, quatre mille Cosaques enveloppent un de
leurs détachements commandé par deux officiers. Les dragons sont un contre dix :
qu’importe ! Ces fiers soldats n’ont jamais compté. – Chargez ! – C’est un
tourbillon contre un ouragan.
Le tourbillon balaie l’ouragan, le détachement
écrase les Cosaques, mais il perd cinquante hommes et ses deux officiers.
A
Malojaroslawetz, les escadrons de Platow pénètrent jusqu’au quartier général de
Napoléon et enlèvent six bouches à feu. Bessières, Rapp, le major Letort
s’élancent : « A nous les dragons ! » Aussitôt l’ennemi est culbuté, sabré,
haché, et les pièces, teintes du sang des Russes rentrent au quartier
général.
Dorogobuj, Orcha, Borisow, toutes les étapes de la route sinistre,
toutes stations de l’épouvantable calvaire, virent les charges héroïques des
hommes fantômes montés sur les chevaux-squelettes.
Dans l’océan de neige, où
la Grande Armée, devenue sourde à la voix de son pilote, flotta comme un navire
désemparé et connut les angoisses du naufrage, Napoléon put apprécier
l’inébranlable fidélité de la vieille Garde. Cette fidélité le consola de bien
des déceptions, de bien des souffrances, de bien des deuils ; elle fut comme un
baume très doux sur la blessure de son cœur.
Dès son retour en France, il
pleura les morts et combla les vivants de ses faveurs, acquittant ainsi la dette
de reconnaissance contractée dans l’infortune. Puis il voulut oublier ce passé
douloureux, et il prépara l’avenir en ouvrant les rangs de sa Garde à de
nouveaux dévouements.
Le 23 janvier 1813, le régiment de dragons s’augmenta
d’un sixième escadron, dont les trois cents hommes se nommèrent « seconds
dragons de jeune Garde » ; ils portaient le même costume que les anciens, mais
n’avaient pas d’aiguillettes.
Ces jeunes cavaliers rêvaient d’entrer dans la
carrière où leurs aînés avaient moissonné la gloire.
Ils y entrèrent quelques
mois plus tard à Bautzen et à Wurschen, se battirent ensuite à Dresde, à
Geyersberg, à Nollendorf, à Peterswalde, et trouvèrent la gloire le 16 octobre à
Wachau, où ils la cueillirent aux côtés de leurs anciens en chargeant avec eux
les cavaliers de la Garde russe et les redoutables cuirassiers
autrichiens.
Le surlendemain, les dragons de la Garde roulèrent un cyclone
dans l’effroyable mêlée de Leipsick, fauchant les hommes comme le vent furieux
des tempêtes fauche en passant les épis mûrs.
Dans la dernière journée de
cette campagne,si glorieuse pour eux, à Hanau, ces merveilleux soldats
reculèrent les limites de l’héroïsme.
Dix mille ennemis enveloppaient les
canons français, que les flots sans cesse renouvelés de ce torrent humain
battaient avec rage. Les canons éteints, c’était la route de France coupée,
c’était la captivité ou la mort, c’était la ruine.
Les dragons de la Garde,
enlevés par l’intrépide Letort déjà blessé, opposent au torrent furieux la digue
de leurs poitrines et brisent l’élan des flots menaçants.
Devant ces hommes
devenus des démons, devant ce régiment devenu torrent à son tour, les escadrons
autrichiens et bavarois, les Cosaques de Czernichew, se débandent et
tourbillonnent dans la plaine étroite que balaient les boulets des artilleurs de
Drouot.
La route de France était libre.
Mais les dragons payaient de
beaucoup de sang leurs magnifiques lauriers : pas un seul qui ne fût couvert de
blessures ; le chef d’escadron Testot-Ferry avait reçu vingt-deux coups de
sabre, Letort avait eu un cheval tué sous lui.
Dans la plaine d’Hanau, les
géants de la vieille Garde avaient ouvert à l’armée française la route de la
patrie ; mais n’avaient pas pu, hélas ! la fermer derrière nos
soldats.
L’azur ensoleillé où l’aigle impérial avait plané si longtemps
disparaissait sous les nuages menaçants ; la nation tout entière vivait dans une
atmosphère de tristesse et d’angoisse, devant un inconnu lourd de dangers et de
larmes.
Au mois de janvier 1814, les cloches des vieilles églises de la
Champagne, ces aïeules de bronze dont la voix chevrotante avait si longtemps
remercié le ciel des succès de nos armes, mêlèrent leurs sanglots au fracas du
canon de Bar-sur-Aube.
La tragédie qui allait se dérouler autour du trône de
Napoléon venait de commencer ; tous les vaincus, qui depuis quinze ans
attendaient leur heure, se ruaient, unis dans une même haine, sur le vainqueur
trahi par la fortune. C’était la lutte de l’Europe contre la France, d’un monde
contre une nation.
A l’Europe, l’Empereur opposa sa vieille Garde. Pour les
dragons, ce fut une nouvelle floraison de gloire sous une formidable poussée
d’héroïsme, une chevauchée merveilleuse avec arrêt sur tous les champs de
bataille.
Flanqués d’un régiment d’éclaireurs qui avait été créé le 9
décembre 1813, ils chargèrent à Lonjeau, à Bar, à Brienne, à la Rothière, à
Troyes, à Champaubert, à Montmirail,à Château-Thierry, à Vauchamp, à Mormant,à
Montereau, à Méry, à Reims, à Craonne, à Arcis, à Saint-Dizier, à Paris ; ils
chargèrent partout, et partout, ils furent beaux comme des dieux.
A
Champaubert, cent dragons firent déposer les armes à quinze cents Russes ; à
Château-Thierry, le régiment broya huit bataillons formés en carrés et prit
douze canons ; à Château-Thierry encore, Napoléon embrassa tous ses dragons,
ivres de joie et d’orgueil, sur la joue du brave Letort, qui les commandait.
C’était ainsi qu’au temps de la chevalerie, le roi Henri II avait récompensé
Tavannes, le héros de Renty.
L’Europe ne put vaincre la vieille Garde, mais
elle la noya sous le flot de ses innombrables bataillons, et la campagne de
France, où le génie de Napoléon atteignit au sublime, se termina dans la cour de
Fontainebleau.
Le 12 mars 1814, le régiment des dragons de la Garde devint le
« corps royal des dragons de France ».
Mais si la fantaisie d’un nouveau
maître pouvait changer le nom du régiment, il était impossible de changer l’âme
des braves qui le composaient, de changer leur cœur.
De cœur et d’âme, ces
fidèles soldats restèrent au Maître exilé, dont l’infortune habitait un îlot de
la méditerranée et dont la gloire habitait le monde ; leurs pensées et leurs
espérances allaient vers un coin de verdure ensoleillé perdu entre deux infinis,
que la haine de l’Europe avait donné pour prison à leur Empereur.
Et lorsque
l’Empereur vint redemander à la France son trône et son armée, ils ne
manifestèrent aucun étonnement : ils l’attendaient ; ils l’attendaient et ils
étaient prêts.
De nouveau l’Europe se dressa devant ce trône qui ne voulait
pas tomber, et les dragons purent rêver de grandes choses.
Hélas ! Ce ne fut
qu’un rêve, un beau rêve.
Le 16 juin, ils virent briller à Fleurus, le
dernier sourire de la victoire, puis ils marchèrent vers les champs de Waterloo,
où trois cents dragons, vingt-cinq officiers et le vaillant Letort trouvèrent
une fin digne de leur passé.
Le 16 décembre 1815, le régiment fut licencié,
et les braves qui portaient, vivante, la renommée superbe de tant de morts
regrettèrent de n’avoir pas suivi leurs frères dans la tombe éternelle, où
finissent les souffrances humaines.